Les Actus
L’École Professionnelle
Yeznig Mozian de Shushi
renaît à Stepanakert
[20/05/2021] – Astrid Avédissian
Fondée à Shushi en 2015 avec le soutien du Fonds Arménien de France, l’École Professionnelle Yeznig Mozian (EPYM), spécialisée dans les métiers du bâtiment, s’est installée à Stepanakert, suite à la guerre du Haut-Karabagh.
Robert Aydabirian, coordinateur de la commission Education du Fonds Arménien de France, suit de près son développement. Il nous a raconté son redéploiement.
Première école professionnelle des métiers du bâtiment créée en Artsakh, l’EPYM avait été inaugurée à Shushi le 19 septembre 2015.
Conforme aux standards des Centres de Formation des Apprentis de France, le complexe de 4 050 m2 comprenait des salles de classe, des ateliers, des laboratoires, des salles de dessin et d’informatique entièrement équipées, une bibliothèque et une cafétéria, ainsi qu’ une résidence étudiante de 250 places dans un bâtiment séparé. Sa construction, réalisée sous la direction de l’architecte Alain Daronian avait été financée parité par la République du Haut-Karabagh et le Fonds Arménien de France qui avait reçu un legs de M. Yeznig Mozian (1916-2009).
Ce généreux donateur, artisan-tailleur et ancien élève des Mékhitaristes de Sèvres (92) avait souhaité que son legs serve à créer une école d’apprentissage pour les jeunes Arméniens.
UNE PÉRIODE DE TRANSITION DOULOUREUSE
À la rentrée 2020, 186 élèves fréquentaient l’EPYM de Shushi. La ville est depuis passée sous contrôle azerbaïdjanais, suite à la guerre.
Après le cessez-le-feu signé début novembre, 125 d’entre eux sont rentrés en Artsakh.
Parmi ceux qui manquent à l’appel, on déplore une dizaine de morts et plusieurs blessés. Les autres élèves se trouvent toujours en Arménie. Des jeunes, fraîchement diplômés, ont été enrôlés dans l’armée.
Robert Aydabirian a appris dès les premiers jours de la guerre que trois d’entre eux étaient morts au combat. Certains élèves, réfugiés en Arménie, ont décidé de poursuivre leurs études à Stepanakert, quitte à laisser leurs parents à Erevan, car l’école jouit d’une excellente réputation.
Une maison a été aménagée pour accueillir 45 internes. Ils y sont à la fois nourris et logés. Les cours ont repris le 11 janvier, au sein de l’ancienne école professionnelle de Stepanakert où l’EPYM s’est installée, provisoirement. L’équipe pédagogique est la même qu’à Shushi.
UN NOUVEAU DÉPART
Fin février, le ministre des infrastructures et des transports du Haut-Karabagh, Hayk Khanoumyan, a mis à disposition de l’école les anciens locaux d’une usine de fabrication d’équipements électrotechniques et de télécom, bien plus vastes, avec une surface de 3 300 m2 qu’il va falloir aménager.
Le cursus proposé à Stepanakert est exactement le même qu’à Shushi. Un programme d’enseignement général, de langue et de formation professionnelle est dispensé à l’EPYM. En conformité avec les normes éducatives européennes, l’école a conclu des accords de coopération avec des écoles professionnelles françaises. Elle propose plusieurs spécialités : gros-oeuvre, finition, électricité, métallerie, menuiserie et plomberie-chauffage. Formé en France, le corps enseignant prépare, sur trois ans, des apprentis venus des différentes régions d’Artsakh aux métiers de peintre, plâtrier, carreleur, plombier, chauffagiste, maçon, coffreur, métallier, serrurier, électricien… Dans le cadre de leur cursus, les étudiants acquièrent une expérience pratique en travaillant en alternance au sein d’entreprises de construction locales partenaires.
UNE RÉORGANISATION AU SEIN DE LA DIRECTION
Nara Ichkhanian, auparavant directrice pédagogique de l’EPYM de Shushi, a pris les rênes de l’établissement. Elle a été nommée directrice exécutive de l’EPYM de Stepanakert. « Elle s’est lancée dans cette mission avec un courage exceptionnel, car il y a beaucoup à faire, note Robert Aydabirian. Elle peut compter sur le soutien de l’ancien directeur, Vaspourak Karapetian et des professeurs, notamment Eric Verdiyan, qui assume par ailleurs la fonction de directeur adjoint. Nous sommes en contact quasi-quotidien. La communication est facile, car Nara s’exprime parfaitement en français, ayant enseigné notre langue. Elle possède par ailleurs une formation d’ingénieur chimiste ».
UN RÉÉQUIPEMENT NÉCESSAIRE
Pour aider l’EPYM à dispenser ses cours avec le matériel adéquat (tout étant resté à Shushi), le Fonds Arménien de France a pu compter sur la générosité de l’ONG française Architectes de l’Urgence. « Elle nous a offert une grande diversité d’outils de grande qualité, se réjouit Robert Aydabirian. D’ici début avril, un container chargé de 24 palettes, constitué par Architectes de l’Urgence, arrivera à Erevan depuis Marseille.
Le Fonds remercie l’ONG pour sa solidarité, ainsi que Lévon Baghdassarian – de l’agence de voyages Saberatours – pour avoir permis leur mise en relation ».